Comme Chirac avant lui, Sarkozy, s’il est élu, le sera par la gauche. Comme Chirac avant lui, il s'en fichera comme d'une guigne.
Serge July s’était déjà fait remonter les bretelles en mai 2005, son peu d’indulgence à l’égard des responsables de la débâcle référendaire étant resté en travers de la gorge de ces derniers ― nombreux parmi ses lecteurs. Il était prévisible que son successeur à la tête de Libération, Laurent Joffrin, soit confronté aux mêmes types de réactions outragées en publiant son analyse de « l’impasse Bayrou ».
C’est qu’ils sont difficiles à suivre, les fans de Libé... Unanimes dans leur défense de principe d’Alain Duhamel, dont ils perçoivent le coming out bayrouiste comme une « formidable avancée démocratique », ils n’en dénient pas moins au patron d’un journal « de gauche » le droit d’afficher la couleur à l'occasion d’un scrutin majeur. Et qu’ils en pincent pour le berger du Larzac ou pour l’éleveur du Béarn, pas question pour eux de se voir renvoyer à la figure les conséquences de leur inconséquence.
Bon, en 2002, il était toujours possible de leur accorder le bénéfice du doute : en votant pour Besancenot, Taubira et les autres, ils ne cherchaient qu’à envoyer un « message » au PS et auraient gentiment rallié le camp de base si les choses s’étaient déroulées « normalement ». En 2005, pour autant, c’est en clamant sur tous les tons leur amour de l’Europe qu’ils devaient s’en faire les fossoyeurs... D’où l’agacement de July (et le mien, évidemment). Cette année, la défaite de la gauche pourrait bien résulter des efforts conjugués des orthodoxes et des bobos, les uns comme les autres refusant d'accorder leur voix à Ségolène Royal ― une candidate simultanément pas assez et trop à gauche.
Mais les faits sont têtus et le candidat pour lequel on ne vote pas est bien moins susceptible de gagner que celui pour lequel votent ses adversaires. Et une fois leur « message » envoyé, une fois leur pureté exprimée, une fois leur snobisme avéré, nos amis orthodoxes et bobos n’auront plus qu'à arbitrer entre Sarkozy et Le Pen. Comme d’hab', dira-t-on bientôt...
Bien entendu, une victoire de Bayrou est du domaine du possible, même si les chances de voir se reporter sur le fameux troisième homme les voix de nos sympathiques altermarxistes, auxquels Ségolène donnait déjà le sentiment de placer la France sur une trajectoire tragiquement ultranéolibérale, sont assez faibles. Mais son concept bisounoursien d’une grande coalition fraternelle (à l’allemande ? à l’italienne ?) n'étant ni concevable, compte tenu de l’échéance législative, ni même souhaitable, compte tenu des réalités politiques françaises, quel serait le sens de cette victoire ?
Laurent Joffrin, comme Serge July avant lui, ne faisait la semaine dernière qu’enfoncer des portes ouvertes : pour que la gauche l’emporte, il faut voter pour elle. Et lorsque Bové et Bayrou sont dans un bateau, que l’un ou l’autre tombe à l’eau n’a pas grande importance ; dans les deux cas, c’est Sarkozy qui reste au sec. Et Sarkozy est de droite.
©Commentaires & vaticinations
En suivant ce raisonnement, il est donc impossible aux électeurs de bouleverser l'ordre des choses. Seuls les élites une fois au pouvoir on le droit de le faire.
Bien sûr que pour être élu il faut que les électeurs votent pour un(e) candidat(e), mais si ils ne veulent pas, on fait quoi ? On les culpabilise ? On sort l'épouvantail ? On fait pleurer dans les chaumières ?
Rédigé par : CedricA | mardi 06 mars 2007 à 13:47
Oui, on fait quoi quand une candidate socialiste ne parvient pas à transformer l'enthousiasme initial autour de sa candidature, voire devient elle-même l'épouvantail ?
Mépriser les électeurs de gauche aujourd'hui orphelins d'un vote qui leur soit propre en les taxant d'être soit "orthodoxes" soit "bobos" n'est pas non plus quelque chose de particulièrement constructif..
Rédigé par : Geoff | mardi 06 mars 2007 à 14:00
Il n'est hélas pas encore totalement exclu qu'au bout du compte un réflexe pavlovien me fasse rentrer dans le troupeau ségoléniste comme le bon petit mouton que je suis. Mais ce sera entièrement dû au fait que je ne suis pas assez méchant, et vraiment pas du tout à ta prose culpabilisante, mon cher Hugues. Elle ne me culpabilise pas du tout, bien au contraire: plus la perspective du vote Bayrou emmerde les groupies de Ségolène, plus je me délecte à fantasmer là-dessus.
Je ne pense pas que ça t'inquiétait le moins du monde (tu as des nerfs d'acier), mais je te rassure quand même: si au bout du compte je ne rentre pas au bercail et que je finis par voter comme le social-traître archéo-marxiste et crypto-sarkozien que j'ai toujours été (si je vote Bayrou, en clair), ce sera beaucoup moins à cause de ta prose qu'en raison des propos de Ségolène en personne. Son interview dans le Monde d'hier est un monument de vacuité et de langue de bois (en dépit de quelques accents très franchement droitiers de ci de là), mais aussi -- et ça, je m'y attendais moins -- la démonstration d'une suffisance et d'une vanité que je n'avais plus jamais rencontrées dans le discours politique depuis la défaite du regrettable Giscard. J'en suis encore tout ébaubi.
C'est le mépris du populo qui fera perdre cette élection à Ségolène. Laisse-la donc faire, Hugues, et dispense-toi du mauvais goût d'en rajouter une couche toi-même. Toi, tu as besoin de forcer ta nature pour être antipathique; chez elle, c'est visiblement inné.
Rédigé par : Poil de lama | mardi 06 mars 2007 à 14:34
ça me fait doucement rigoler de voir des bobos qui ont voté oui en se moquant des malheureux nonistes égarés venir se plaindre de plus bobo qu'eux !
Rédigé par : edgar | mardi 06 mars 2007 à 14:52
à avoir menacé de sanctions ceux parmi les élus PS qui avaient encore quelque foi en la doctrine de la gauche plurielle, à stigmatiser plutôt qu'à rassembler, à lever les gauches les unes contre les autres, le couple infernal Hollande/Royal récolteront ce qu'ils auront semé : le désarroi, la désolation et, espérons-le, l'oubli.
Le printemps reviendra : cinq ans, ce n'est rien. Quand on a déjà tout perdu, qu'importe ?
Rédigé par : Le PS à l'ANPE ! | mardi 06 mars 2007 à 15:38
Tu n'aurais pas dû t'arrêter au Libé du 2 mars, Hugues. Joffrin revenait hier sur Bayrou, avec un regard nettement moins dur...
http://www.liberation.fr/rebonds/courrier/238740.FR.php
Rédigé par : Mathieu | mardi 06 mars 2007 à 17:00
«En suivant ce raisonnement, il est donc impossible aux électeurs de bouleverser l'ordre des choses. Seuls les élites une fois au pouvoir on le droit de le faire.»
Le principe de base d'une démocratie, c'est qu'une électeur n'est pas limité au droit de vote, mais jouit également du droit de se lancer lui-même en politique et de piquer la place aux dites "élites". Si l'offre politique actuelle est si déplaisante, il est complètement absurde d'attendre la venue d'un Messie politique qui ne sera messianique que parce que ses colleurs d'affiche lui collent une envergue 700 fois plus grande que la réalité. Mieux vaut prendre le taureau par les cornes soi-même, en espérant que d'autres ne faisant pas partie de l'élite fassent de même. (D'autant plus que le Bayrou lui-même est un éminent membre de l'élite dirigeante)
Rédigé par : Laurent Weppe | mardi 06 mars 2007 à 17:35
C'est peut être mon âge, moi qui suis né sous la quatrième juste avant qu'elle n'expire, mais je vais voter Royale.
Non pas parcequ'elle me ravi, je n'ai toujours pas compris comment elle est arrivée de nulle part pour être investie candidate officielle du PS; à tel point que lorsque je pose l'équation: Influence des médias de Sarkosy / rôle de ceux-ci dans la danse nuptiale de Royale, je recommencerais presqu'à croire à la théorie du complot.
Non je voterai Royale, car je ne peux pas imaginer que le PS ne soit pas présent au deuxième tour d'une élection présidentielle deux fois de suite.
Je ne suis pas membre du PS, mais c'est le seul parti qui propose une alternance crédible et qui possède les cadres suffisant pour être une opposition agissante.
Or, après 2002 le PS avait pris une telle claque qu'il était dans l'impossibilité de tenir sa place d'opposition.
Personne ne donnait la réplique au gouvernement Raffarin.
Je ne voudrais pas qu'après une telle première secousse, une deuxième de même amplitude n'amène la désagrégation du PS.
Une logique de parti donc et non le choix d'une personne.
Mon vote ne sera pas un vote de choix d'un président mais celui de sauvegarde d'une opposition.
Vous aurez compris que je ne fais aucune illusion sur les chances de Royale dans un second tour, mais il est primordiale pour le débat futur, qu'elle y soit présente.
Rédigé par : Jacky Liebgott | mardi 06 mars 2007 à 18:33
Joffrin s'est moins fait tacler sur le fond - une défense somme toute maladroite du PS - que sur la forme, franchement méprisante à l'égard de l'abominable homme des Pyrénées.
Du reste, cela renvoyait sans doute à l'agacement profond du peuple de gauche. Obligé de constater que leur candidate, empêtrée dans la ronde des éléphants, peine à s'affirmer et se voit forcée de concilier la chèvre fabiusienne avec le chou strauss-khanien. A la vérité, le boulet de Ségolène, c'est le PS. Un PS qui n'a pas réussi à se structurer autour d'un projet idéologique moderne. Le parti donne l'image d'un agrégat de baronnies plutôt soucieuses de tirer sur leur cheftaine que de faire avancer un projet de société. Si Ségolène succombe, ce sera avec les honneurs - mais il ne suffit pas d'une fée Clochette pour transformer la citrouille socialiste en carosse électoral. La messe est loin d'être dite, mais minuit approche...
Rédigé par : Marc | mardi 06 mars 2007 à 18:33
Il faudrait quand même arrêter la mauvaise foi...
"Cette année, la défaite de la gauche pourrait bien résulter des efforts conjugués des orthodoxes et des bobos, les uns comme les autres refusant d'accorder leur voix à Ségolène Royal ― une candidate simultanément pas assez et trop à gauche."
Si la gauche échoue aux élections, ce sera faute d'avoir convaincu de la solidité de sa candidature et de son programme. On ne vote pas aveuglément pour "la gauche" ou "la droite", ou parce qu'on est smicard ou bobo, ou parce qu'il importe de faire perdurer un paysage politique connu donc rassurant (ce qui peut tout à fait se comprendre d'ailleurs) on vote en fonction d'une adhésion réfléchie à un projet et à une personne qui l'incarne. Ou alors être citoyen ne veut plus rien dire.
Renvoyer les déçus du socialisme dans des catégories telles que "bobo" n'est pas seulement méprisant (puisque cela sous-entend un comportement dicté par l'appartenance à une fantasmatique classe sociale), c'est surtout puéril. Et ça sert à éviter de se demander pourquoi, dans le fond, certains choisissent de voter POUR l'un plutôt que pour l'autre (et non pas pour l'un CONTRE l'autre, comme l'estimable auteur de ce blog semble le penser).
Pour info, je suis smicard, et je ne me considère pas "bobo". A partir du moment où la candidature Royal a cessé de me convaincre, je me suis intéressé plus en détail aux autres candidats, et Bayrou a emporté mon adhésion, au point que j'ai décidé de voter POUR lui. Et je refuse à quiconque d'affirmer qu'il s'agit simplement d'une attitude de rejet infantile, merci ;-)
"Et une fois leur « message » envoyé, une fois leur pureté exprimée, une fois leur snobisme avéré, nos amis orthodoxes et bobos n’auront plus qu'à arbitrer entre Sarkozy et Le Pen."
Alors, déjà, rappelons que décider de ne plus voter pour quelqu'un ne signifie pas forcément qu'on veut lui envoyer un "message", mais peut tout simplement signifier qu'après ré-examen on préfère accroitre les chances de succès d'un autre candidat. Peut-on nous accorder la volonté d'utiliser le vote pour ce à quoi il sert, à la base, quand même ? Merci d'avance :).
Ensuite, bon, là y'a un truc que je comprends pas. Si Le Pen était au dessus de Bayrou, les voix qui se reportent de Royal à Bayrou risquerait de faire passer Royal en dessous de Le Pen, et hop, le méchant passe au 2d tour, ce qui est certes désagréable. Sauf que là non. Plus il se confirme que Bayrou est au dessus de Le Pen, plus Bayrou a de chance de passer au 2d tour, et plus la probabilité que Le Pen accède au second tour est faible. Le troisième homme n'est plus Le Pen, mais Bayrou, c'est de plus en plus clair.
Bref, si vous voulez critiquer la candidature Bayrou, faites-le sur son programme, sur l'homme. Chercher à culpabiliser les électeurs sert surtout à démontrer que finalement le programme de Bayrou n'est pas si mauvais que ça, puisque ses adversaires évitent d'en parler ;). Et que les électeurs de Bayrou ont bien raison de ne pas se laisser intimider, et de vouloir rendre au vote sa véritable signification...
(Je profite de ce premier message pour dire que, quand même, j'aime bien ce blog.)
Rédigé par : thomas | mardi 06 mars 2007 à 21:26
Tout pareil que Thomas.
Rédigé par : Denis | mardi 06 mars 2007 à 21:43
Je ne vois vraiment pas comment je pourrais voter socialiste : Je suis de gauche...
Rédigé par : Swâmi Petaramesh | mardi 06 mars 2007 à 23:09
Thomas, parlons en effet du programme de Bayrou.
Pas grand chose à se mettre sous la dent pour le moment mais j'ai noté :
- moins-disant budgétaire comme argument électoral (les deux autres ont donné le bâton pour se faire battre il faut dire...). conduit à réduction de la dette comme priorité.
cela n'a de sens que si l'on n'est pas capable de proposer des investissements plus rentables que le taux d'intérêt très bas auquel l'Etat est endetté. la dette (je rappelle au passage que les créanciers sont le plus souvent des français) n'est pas nécessairement un mal. L'important est la capacité de la dépense à générer les conditions de son remboursement dans l'avenir (des universités mieux dotées -et reformées- c'est plus de capital humain et finalement plus de richesse -pas seulement monétaire- pour les bénéficiaires de cet effort d'éducation, qu'ils contribuent plus tard à cette dépense en remboursant la dette n'est pas anormale...)
- Bayrou va jusqu'à proposer une loi pour interdire les déficits budgétaires. Impossible à mettre en oeuvre et heureusement d'ailleurs, se priver de la possibilité de l'endettement serait absurde.
- 2 emplois sans charges dans chaque entreprise : coûterait très cher pour pas grand chose. des entreprises qui de toute façon devaient embaucher en bénéficieront (effet d'aubaine, même quand le chômage augmente il y a des centaines de milliers d'emplois créés chaque année). incitation à créer des boites plus petites, à scinder des entreprises existantes, éventuellement au détriment de l'efficacité productive (effet de seuil)
En fait j'ai le sentiment qu'au fond ses électeurs (potentiels) se foutent pas mal du programme de Bayrou.
Il est celui qui pourrait faire "turbuler" le système tout en étant infiniment plus fréquentable que Le Pen. c'est beaucoup plus important.
Je continue à croire que l'avenir du camp réformiste est à gauche.
Un tandem Royal-DSK me paraît être la meilleure réponse à Bayrou.
Si Bayrou est opposé à Sarkozy au second tour, je vote Bayrou, avec tous les socialistes que je connais.
Si l'UDF est nécessaire pour former une majorité au centre-gauche et rejetter l'UMP dans l'opposition j'appuie cette alliance, et je crois que la majorité du PS aussi.
Que ferait Bayrou et son parti (surtout son parti d'ailleurs -ses députés en particulier-) dans des cas symétriques ?
Pas de réponse. évidemment, il faut bien prévoir l'éventualité d'un second tour contre Royal...
Un peu de prospective concernant Bayrou ici : http://www.ps-gentilly.org/article-5891123.html
Rédigé par : Guillaume | mardi 06 mars 2007 à 23:32
Guillaume,
Je crains qu'il n'y ait un petit malentendu. Bayrou n'a JAMAIS parlé d'interdire les déficits budgétaires liés aux investissements, mais UNIQUEMENT les déficits de fonctionnement. Pas de soucis pour l'investissement productif, donc, mais une incitation forte à améliorer l'efficacité des services publics.
Pour les deux emplois sans charge, honnêtement je ne suis pas vraiment convaincu non plus. Mais il ne s'agit de toute façon que d'un "coup de pouce" provisoire pour contribuer à relancer la machine, ce n'est certainement pas le coeur de ses propositions ! Evidemment, c'est celle que les médias mettent en avant, c'est la plus facile à résumer...
Et vous ne parlez que de deux items, sur un programme qui en compte des centaines, avec une hiérarchisation et une cohérence certaine. Bref, vos remarques sont un peu réductrices, ceci dit cordialement ;).
Pour info, vous pouvez retrouver l'ensemble du programme sur www.bayrou.fr .
Cordialement (bis),
thomas
Rédigé par : thomas | mercredi 07 mars 2007 à 01:16
Je trouve un peu etonnant que pour critiquer le choix Bayrou on nous dise que son programme n'est pas parfait.
Pour moi il me suffit de le trouver meilleur. Et c'est totalement subjectif.
J'y ajouterai que Bayrou a eu ces dernieres annees un message d'opposition a l'UMP plus audible, plus coherent et plus interessant que le PS en general et Francois Hollande en particulier (mais c'est surement a cause des vilains medias de droite comme libe...).
Rédigé par : Denis | mercredi 07 mars 2007 à 01:29
"la chèvre fabiusienne avec le chou strauss-khanien"
Elle est bien bonne celle là. Pour reprendre l'expression d'une élue fabusienne, il n'y pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarettes entre Fabius et Strauss, simplement l'un avait décidé de jouer à la base sur une acceptation de l'étiquette socdem qu'on lui colle alors que l'autre avait décidé de gauchir son discours en espérant caresser dans le sens du poil un électorat d'extrême gauche très volage. Question de stratégie électorale, pas d'idéologie.
Quant au "projet idéologique moderne", pour l'instant, les seuls projets idéologiques présentés comme "modernes" sont des reprises de vieilles lunes politiciennes qu'on enrobe de mot compliqués pour faire intello de haut vol. Ainsi les suplly-sides economics de Sarkozy c'est de l'idéologie moderne, Bayrou qui fait du Hoover avec 75 ans de retard, c'est moderne, cacher son mépris du commun des mortels derrière chiffres et théories macro-économiques à moitié comprises, c'est moderne aussi, et toute tentative de répondre que, d'un point de vue rationnel, tout ça a déjà été fait par le passé, au point d'être désormais dans les livres d'histoire, au chapitre "foutaises politiciennes qui se plantent une fois mise en application" passe immédiatement pour un mépris de ceux qui semblent croire à ces sornettes, comme si le fait de mettre en garde la potentielle victime d'une arnaque était en soi méprisant à son égard.
***
Maintenant, l'aspect "bobo" du vote Bayrou, je n'y croyait pas vraiment, c'est à dire, même s'il était très clair qu'au sein du microcosme militant il existait un groupe prêt à voter contre Royal par élitisme exacerbé ou stratégie politiciennes à la con (du type "si Royal perd, le PS meurt, donc la "vrai gauche" pourra prendre tous ses électeurs et prendre le pouvoir"), j'avais tendance à considérer qu'il s'agissait d'un comportement qu'on ne retrouverait que dans le petit monde des notables et apprentis notables, et que le reste de la population suivait une logique toute différente. Cela dit, si je prend ce que j'ai pu voir dans mes propres relations, qui ne sont certes pas représentatives de l'ensemble de la population, mais encore suffisamment hétérogènes pour être intéressantes, je me rends compte que ce n'est pas parmis les bourges sarkozystes que Bayrou engrange, ni parmi ceux qui appartiennent aux classes pas-moyennes qui sont à peu près autant désabusés de la politique qu'au lendemain de 2002, mais bien parmi les universitaires persuadés d'être plus futés que la terre entière et autres professions libérales restées chiraquiennes jusqu'à la débâcle référendaire. En d'autres termes, le côté bobo de la séduction de Bayrou, je me rends compte que finalement, il apparaît comme authentique dans mon propre réseau de relations.
Rédigé par : Laurent Weppe | mercredi 07 mars 2007 à 01:42
ce bon vieux Marcelle a des choses à écrire
http://www.liberation.fr/rebonds/238899.FR.php
Bon et sur le fond, à part brandir l'épouvantail Sarko (argument étrange car le TSS oriente actuellement vers un vote Bayrou), des arguments pour voter Sego ? Ah oui la régionalisation d'Airbus...
Rédigé par : Eviv Bulgroz | mercredi 07 mars 2007 à 08:51
En vadrouille professionnelle en Suisse, je n'ai guère le loisir de plonger dans cet intéressant fil de conversation dans l'immédiat. Mais ce n'est que partie remise...
Rédigé par : Hugues | mercredi 07 mars 2007 à 08:58
c'est vrai Thomas, Bayrou ne parle que du déficit de fonctionnement, je me suis trop vite fié (ou ai lu trop vite?) à l'article de Wyplosz sur telos-eu. Cela dit ce genre de contrainte est inutile et peut facilement être contournée. Une dépense dans l'éducation c'est du fonctionnement ou de l'investissement? construire des locaux pour une université de l'investissement? payer un enseignant-chercheur du fonctionnement?... on ouvre des débats sans fin, parfaitement inutiles.
parlons plutôt de l'efficacité de la dépense publique, qu'elle soit classée comme de fonctionnement ou d'investissement. Point sur lequel tous les candidats ont à travailler...
Le problème avec le programme de Bayrou (dont je veux bien concéder qu'il n'est peut-être pas si mal, je le connais trop peu pour avoir un jugement définitif) c'est qu'il est parfaitement virtuel. A supposé que Bayrou soit élu, ce qu'il tentera de mettre en oeuvre dépendra de quel camp il aura fait perdre.
Le pari de pas mal de bayrouistes de gauche est qu'il fera perdre la gauche, qui se ralliera ensuite à son panache blanc pour évincer l'UMP...
Rédigé par : Guillaume | mercredi 07 mars 2007 à 09:54
Je partage la position de Cohn-Bendit : la candidature de Ségolène Royal ne correspond pas à toutes mes positions politiques. C'est une sorte de dénominateur commun, forcément affadi. Mais elle est celle qui a le plus de chance de l'emporter A GAUCHE. Et les listes d'extrême gauche ou anti-libérales n'en ont strictement aucune. Bové et Besancenot parlent très bien, mais ne supportent pas un autre leadership que le leur. Quant à François Bayrou, franchement... La démocratie chrétienne en héritage, Giscard d'Estaing, comme modèle, on a vu ce que ça a donné. C'est un peu facile de nous la jouer "ni droite-ni gauche" quand il s'agit de se faire élire. Sa conversion est trop rapide pour être honnête.
Rédigé par : Ted et Eux | mercredi 07 mars 2007 à 12:25
Mais enfin, ceux qui ne peuvent pas voter socialiste parce qu'ils sont à gauche, c'est parce qu'ils veulent Sarko, non? En espérant que tout explose parce que quand ça ira plus mal ça ira mieux.
Ils seront bien servis je pense. Parce que ça ira surement encore plus mal qu'ils ne le pensent sans aucun espoir que ça aille mieux. Ce qui réjouis déjà par avance un tas de gens qui pavoisent déjà sur les blogs de droites. Vous ne les lisez pas de temps en temps sur "Lieu-commun"? C'est flagrant.
Rédigé par : Lory Calque | mercredi 07 mars 2007 à 23:59
La revanche des socio traîtres :
« On savait que François Bayrou voulait nommer un Premier ministre de gauche, un "Delors Jeune" selon le portrait robot, Strauss-Kahn, Kouchner... Les étudiants de Sciences Po Lyon, où le candidat centriste était en déplacement mercredi après-midi, ont bien tenté de lui tirer les vers du nés.
"Est-ce que j'ai une idée du Premier ministre", lance François Bayrou. "Oui". La salle, s'impatiente, "un nom, un nom", réclament les étudiants. "Non, je ne voudrais pas de nom", tempère le centriste. "J'ai une idée de ce ministre là mais comme je ne lui en ai même pas parlé et comme je n'ai pas l'intention de lui en parler avant l'élection présidentielle... »
Mais s'il est élu, François Bayrou entend bien laisser les éléphants socialistes au cimetière. Ce Premier ministre "mystère" serait en fait Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation Mondiale du Commerce et militant PS depuis 38 ans.
Cet ancien collaborateur de Pierre Mauroy à Matignon puis de Jacques Delors à Bruxelles a longtemps était commissaire européen. Des amis communs des deux hommes jouent en ce moment les intermédiaires.
Selon un dirigeant centriste, Pascal Lamy aurait fait savoir à François Bayrou qu'il était très intéressé par sa campagne présidentielle. »
Le PS s’en est donné à cœur joue, d’humilier et de lyncher tous les gens talentueux qui auraient pu en faire un parti social-démocrate fier et puissant. Rocard, Delors, Lamy, Kouchner, Besson, dernier exemple pathétique en date…Mais cette pratique ne s’est pas faite qu’au sommet. Les apparatchiks et les arrivistes ont pris soin de faire le ménage à tous les étages, de la section locale jusqu’au bureau national.
Alors on est parti, les grands comme les petits, les dirigeants comme les cadres et les militants, tristes et dégoûtés de la politique.
Sauf qu’il ne faut jamais désespérer du fameux génie du peuple français. Alors, Mesdames et Messieurs du château de la rue Solferino, soyez inquiets derrière votre grande grille noire :
Les socio traîtres sont de retour…Les bisounours sont revenus, mais ils ont fait un stage chez les Happy Tree Friends.
Rédigé par : tristram | jeudi 08 mars 2007 à 11:23
Lory Calque:
Voter pour quelqu'un d'autre que Ségolène quand on est à gauche est peut-être bien, en effet, une erreur monumentale. Cela dit, chercher à obtenir un second tour Sarko-Bayrou n'est pas du tout la même chose que de voter directement Sarkozy. Pour la raison fort simple que ça pourrait amener la défaite de Sarkozy...
Si vous accusez les sympathisants de gauche tentés par Bayrou de voter à droite, ça peut les toucher (moi, j'admets, ça me gêne); mais si vous faites directement l'amalgame entre eux et Sarkozy, l'argument ne portera pas, parce qu'il est 1) faux; 2) insultant.
Pétard, chers compatriotes ségolénistes (je n'ai pas très envie de vous appeler "camarades", mais comme disait Chimène, je ne vous hais point), vous allez finir par le comprendre, qu'on ne gagne pas une élection en insultant ses électeurs? Si vous n'êtes pas capables de manifester du respect par tactique, contentez-vous de le faire par politesse. A moins que le respect du citoyen lambda ne soit vraiment pas conforme à votre philosophie politique... mais alors faudra pas vous étonner que les électeurs en choisissent de plus gracieux que vous.
Rédigé par : Poil de lama | jeudi 08 mars 2007 à 11:32
On croit rêver en lisant les lignes qui précèdent... « Chercher à obtenir un second tour Bayrou-Sarko n'est pas la même chose que voter directement Sarkozy ». Dans le genre billard à trois bandes foireux... Ce n'est rien d'autre que vouloir laisser le choix entre la droite molle et la droite dure. Je me souviens d'une élection présidentielle, en 1972, qui avait laissé au second tour Pompidou (UDR) contre Poher (centriste autoproclamé). La consigne de vote de la gauche, à l'époque, avait été « Poher-Pompidou, c'est bonnet blanc et blanc bonnet ! », donc abstention. Si on se retrouvait avec le même cas de figure (Bayko-Sarrou) en 2007 (mais c'est loin d'être dit...), l'abstention sera alors le plus beau des choix.
Rédigé par : Ted et Eux | jeudi 08 mars 2007 à 23:29